Science, techniques et couleurs : du 17e au début du 19e siècle
Le 17e siècle est une période de grands changements scientifiques
pour les couleurs.
La conception aristotélicienne des couleurs, prépondérante jusque là, les ordonnait du plus clair au plus foncé : blanc, jaune, rouge, vert, bleu, noir. Parfois, le violet est ajouté entre le bleu et le noir. Ensuite, différentes conceptions voient le jour, basées sur des expériences d'optique, et remettent en question cette classification. Le système des couleurs primaires et secondaires se met en place : d'abord de manière empirique dans la peinture, puis à travers diverses théories scientifiques, comme celle proposée par François d'Aguilon (1567-1617).
Isaac Newton (1642-1727) exclut de manière scientifique le noir et le blanc de l'ordre chromatique. Ses expériences sur l'optique, débutées plus de trente ans auparavant, aboutissent en 1704, dans un ouvrage avec un cercle chromatique comportant sept couleurs : violet, indigo, bleu, vert, jaune, orangé, rouge.
Isaac NEWTON. Optique. |
Ces avancées scientifiques et divers progrès techniques amènent de nouveaux procédés d'impression en couleurs.
Au 17e siècle, la gravure en taille-douce se généralise. Il s'agit d'une gravure sur métal, en creux : contrairement à la gravure sur bois, c'est la partie creusée de la matrice qui reçoit l'encre et dont le tracé apparaît lors de l'impression.
Une possibilité d'impression en couleurs consiste à encrer la plaque de cuivre avec les différentes couleurs nécessaires. Elles sont toutes imprimées à la fois en un seul passage à la presse. On parle d' « encrage à la poupée ». Cette technique se développe réellement à la fin du 17e siècle. Elle est difficile à employer : les couleurs ne doivent pas se mélanger et l'essuyage de la plaque pour retirer les surplus d'encre est particulièrement délicat.
La manière noire, autre technique de gravure en taille-douce, permet d'obtenir des aplats et un rendu proche de la peinture. Un graveur allemand, Jacob Christoph Le Blon (1667-1741), met au point un système d'impression en trichromie : il utilise trois plaques gravées superposées, chacune portant un tracé différent propre à une couleur (rouge, jaune, bleu). Le tirage final comporte toutes les nuances possibles. Cette technique est reprise par ses élèves, dont Jacques Fabien Gautier-Dagoty (1716?-1785), qui l'applique notamment à l'anatomie. Mais la mise en œuvre est longue et difficile, le matériel coûte cher et ce procédé est rapidement abandonné.
Johann Caspar LAVATER. L'art de connaître les hommes par la physionomie... |
L'impression en couleur est souvent complétée par des retouches manuelles.
Jules DUMONT D'URVILLE. Voyage de la corvette L'Astrolabe exécuté pendant les années 1826-1827-1828-1829. Atlas zoologique. |
La colorisation entièrement manuelle ou à l'aide de pochoirs est encore utilisée.
Pierre-François Hugues d'HANCARVILLE. Antiquités étrusques, grecques et romaines. |
Aubin-Louis MILLIN ; A. CLENER (ill.). Peintures de vases antiques vulgairement appelés Étrusques tirées de différentes collections. |
L'invention de la lithographie, à la fin du 18e siècle et de la chromolithographie, qui se démocratise dans les années 1830, font exploser la couleur dans les imprimés, qui n'est alors plus seulement réservée à certains domaines.
La couleur en noir et blancSciences et couleurs : des apports réciproques